Si può sorridere in questo quadro così complesso fra rischi sanitari, lutti tristissimi, economia in bilico, politica tentennante, rabbia popolare montante? Certo che sì e lo considero un dovere. Per cui oggi sarò ludico. Voi prima - prima del "covid-19" e questo "prima" ci apparterrà negli anni a venire - baciavate le persone che incontravate? Chi abbia contezza del mondo francofono - specie Francia e Svizzera Romanda - sa quanto la "bise" sia un fenomeno sociale, due o tre bacetti assieme ad un abbraccio. Devo dire che si tratta di un'abitudine radicata e non c'è bisogno di eccessiva intimità, come mi è capitato di sperimentare e devo dire che fra amici ambosessi e coppie che si frequentano anche in Valle d'Aosta e in Italia capitano gesti di simile familiarità. Ma certo è mano radicato negli usi e costumi.
Oggi tutto questo è diventato tabù. Leggevo a proposito Michel Audétat sul quotidiano svizzero "Le Matin Dimanche": «Du jour au lendemain, la bise a disparu du paysage. Et rien ne garantit qu'elle reviendra de sitôt. Des médecins nous mettent déjà en garde. Interrogé par le "19:30" de la "Rts", le médecin-chef du Service de médecine de premier recours aux "Hug" a douché les espoirs d'un retour rapide: "Nos comportements de vie ont changé, a asséné Idris Guessous. Il y a eu un "avant-covid-19" et il y aura un "après". Il est possible qu'on ne se fasse plus la bise à partir de maintenant". Certains s'en désoleront, mais d'autres s'en réjouiront. Car la bise n'a pas attendu le "covid-19" pour se sentir patraque. Pourquoi les hommes en font-ils aux femmes alors qu'ils se serrent la main entre eux? La bise a été accusée de sexisme et la polémique s'est même invitée au "Tour de France 2019". Une pétition a dénoncé les baisers déposés par une paire de "podium girls" sur les joues des vainqueurs d'étape: "Le vent a tourné et nous devrions rompre avec cette tradition sexiste". Il s'ajoute à la colère féministe une grogne plus large et plus sourde. Une fatigue. Une lassitude. Un ras-le-bol. C'est que la bise a un peu trop pris ses aises. Longtemps réservée au cercle familial ou amical, elle s'est montrée envahissante jusqu'à se répandre dans les rapports professionnels. Va-t-on encore longtemps tendre ses lèvres en cul-de-poule à des gens qu'on a rencontrés pour la première fois? La distribution de bises est devenue une corvée. Trop de bises tue la bise. Le moment n'est-il pas venu de lui dire adieu?». Questo è interessante e forse, a ben pensarci, se ci si abituerà ad una maggior distanziazione, allora anche la vecchia stretta di mano finirà nel dimenticatoio. Per altro, cultura che trovi, e abitudini che cambia. Prosegue l'articolo: «Comme le souligne l'anthropologue David Le Breton, la bise n'est pas universelle et surprend ceux qui en ignorent la coutume: elle peut être aussi déroutante que l'ont été, pour le capitaine Haddock, les enfants tibétains qui le saluaient en tirant la langue ("Malappris!"). Ses racines sont cependant profondes. Cinq siècles avant notre ère, le grec Hérodote avait déjà repéré la bise parmi les rituels de salutations auxquels se livraient les Perses: "Au lieu de se saluer par des paroles, ils se baisent à la bouche. L'un des deux est-il de condition légèrement inférieure, ils se baisent sur les joues. Si l'un d'eux est d'une naissance beaucoup plus basse, il se jette à genoux et se prosterne devant l'autre". Plus précis que nous, les Romains distinguaient trois variétés de baisers. "Osculum": le baiser chaste qui s'échange sur la bouche, mais lèvres serrées, et entre gens d'un même rang social. "Saevium": le baiser érotique (avec la langue) que l'homme réserve aux courtisanes. Et "basium": le baiser affectueux qui se donne entre époux ou entre membres d'une même famille. À ces trois catégories, Saint Paul en ajoute une quatrième quand il recommande dans ses épîtres le "baiser de paix": un baiser qui s'échange entre croyants, quel que soit leur sexe. Mais en 397, alarmé des excès auxquels le "baiser de paix" donne lieu, le troisième concile de Carthage l'interdit entre hommes et femmes. Pour autant, l'europe médiévale n'a pas cessé de s'embrasser comme en témoignent de nombreuses images de baisers entre chevaliers. Au Moyen Âge, le baiser sur la bouche sert aussi à sceller le pacte de fidélité mutuelle entre seigneur et vassal. Il va décliner aux XIVe et XVe siècles. Mais la bise n'a pas n'a pas dit son dernier mot. Dans un ouvrage collectif, ("Le baiser", Autrement, 1997), l'historien Yannick Carré évoque le tournant pris à la Renaissance: "Entre personnes de rangs différents, entre parents et amis, on s'embrasse désormais joue à joue, tandis que le baiser sur la bouche, réservé aux amants, prend, lui, une connotation beaucoup plus érotique". La bise moderne est née. Elle connaîtra encore des déboires. Les pudeurs victoriennes du XIXe siècle la banniront de l'espace public. Mais elle y reviendra après la Première Guerre mondiale. On la chasse par la porte, elle rentre par la fenêtre: au cours de son histoire, la bise a déjà connu bien des retours. Les arguments sanitaires vont-ils cette fois-ci clouer définitivement son cercueil?». L'interrogativo è legittimo e tutto deriva da questa... deriva igienistica su cui si può sorridere, ma che - con quella bestiaccia del virus - va presa molto sul serio. Conclude Audétat: «Maxime Felder n'en est pas convaincu. Sociologue et collaborateur scientifique au "Laboratoire de sociologie urbaine" de l'Epfl, ce spécialiste des relations de voisinage (il a consacré sa thèse de doctorat aux liens sociaux entre voisins) n'exclut pas des changements: "Il est possible que quelques personnes ne fassent plus la bise parce qu'elles craignent davantage pour leur santé, ou parce qu'elles n'aimaient déjà pas cette pratique auparavant". Mais il ajoute que "les habitudes ne changent pas du jour au lendemain" et qu'elles pourraient bientôt reprendre leurs cours. Malgré les mises en garde du corps médical? "Il ne faut pas surestimer notre rationalité, estime Maxime Felder. En Suisse, 27 pour cent des gens fument tout en sachant très bien qu'ils risquent un cancer". Les médecins ne sont d'ailleurs pas unanimes pour sonner le tocsin et mettre la bise au ban de la vie sociale. Médecin et rédacteur en chef de la "Revue médicale suisse", Bertrand Kiefer se consolerait mal de sa disparition: "Ce serait un appauvrissement. La bise contribue à la richesse des rapports humains. Elle dit beaucoup de choses sur la personne avec laquelle on l'échange, notamment parce qu'on respire son odeur. Nous avons oublié à quel point les odeurs sont importantes pour les mammifères que nous sommes". Bertrand Kiefer souhaite donc que la bise revienne quand le "covid-19" s'en sera allé: "Ce qu'on nous dit ces temps-ci, c'est qu'il faut être solitaire pour être solidaire. Mais il ne serait pas sain que cette injonction paradoxale s'installe durablement dans les têtes. Le risque existe qu'on finisse par stériliser la vie". Reste peut-être une solution de compromis: l'air kiss américain, cette bise simulée qui se donne dans le vide, sans même effleurer le visage de l'autre. Bien sûr, l'idée de s'y mettre n'a rien d'exaltant. Toutefois, pratiqué à une distance de sécurité que le corps médical définira au centimètre près, l'air kiss pourrait réunir les partisans du rituel et ceux de l'hygiène». Air kiss? Ma no, per favore!